L’exécution du Maréchal Ney

Le 7 décembre 1815 au matin, on fusille un maréchal d’Empire.

L’un des lieutenants les plus connus de l’Empereur Napoléon Ier paye son ralliement durant les Cent-Jours. Au même titre que 19 autres généraux. D’ailleurs, c’est en totale violation des accords de capitulation négociés par le maréchal Davout, ministre de la Guerre au retour de Napoléon. Un autre maréchal d’Empire, Brune, ne survivra pas au changement de régime. Il sera en effet massacré à Avignon le 2 août 1815.

Michel Ney est né à Sarrelouis le 10 janvier 1769, soit la même année que Napoléon Ier. 
Il devient hussard en 1787. Il est fils d’une famille modeste. Né d’un père était artisan tonnelier, il doit une ascension militaire fulgurante à la Révolution française. Lieutenant en 1792, repéré par le général Kléber, il devient lui-même général en 1796.
Il fait sas preuves au sein de l’Armée du Nord pendant que Bonaparte combat lui en Italie et en Égypte. Ainsi, sous la Révolution, les deux hommes ne se côtoient pas. Alors général de division, il ne soutient que mollement les journées de Brumaire. Il n’entre pas dans les faveurs du nouveau Premier Consul au départ.
En 1800, il sert Moreau à Hohenliden et assoit son statut de héros de l’armée du Nord.
Il est nommé ministre plénipotentiaire auprès de la République helvétique en 1802. Il fait preuve de pragmatisme et d’un talent diplomatique relevé par Talleyrand en personne …
Lors de la proclamation de l’Empire, il fait partie de la première promotion des maréchaux et figure au 12ème rang sur 18. 
Portrait du maréchal Ney visible au mémorial waterloo 1815

Durant la campagne d’Allemagne de 1805 Napoléon découvre ses talents de meneur d’hommes.

Il réalise un formidable coup d’éclat à Elchingen le 14 octobre. Pour cela, il deviendra en 1808 duc d’Elchingen. Il ne participe pas à la bataille d’Austerlitz. Commandant néanmoins l’aile droite de la Grande Armée, le Maréchal Ney chasse du Tyrol l’archiduc Jean, emportant de belles victoires.
Il est ensuite Malmené à Iéna où il se serait fait encerclé sans l’intervention du maréchal Lannes.
L’année suivante en 1807, grâce à son arrivée sur le champ de bataille, la bataille d’Eylau est une victoire. Friedland confirme également son courage et sa ténacité.
Jaloux de certains de ses collègues il est aussi colérique que courageux. Il déteste le maréchal Soult par exemple. « le Rougeaud » provoque des conflits en Espagne. Cela lui vaudra aussi quelques passes d’armes avec Napoléon et d’être démis de son commandement en 1811.
Le maréchal va se rattraper brillamment en Russie. En effet, son comportement à la Moskowa mais surtout durant la retraite, sont devenus légendaires ! A Krasnoi, il est à la tête d’une arrière garde de seulement 6 000 hommes. Harcelé par des cosaques et des troupes russes quasiment deux fois plus nombreuses, il parvient à rejoindre le reste de l’armée. À quel prix ! Plusieurs jours de manœuvres que d’aucun aurait jugé désespérées. Lors de la victoire de la Bérézina (qui fut bien une victoire française), ses cuirassiers parviennent à faire près de 5 000 prisonniers !

Le Maréchal Ney de retour de la campagne de Russie

Cette campagne restera certainement sa meilleure. Il est proclamé prince de la Moskowa par Napoléon. 
Sa campagne d’Allemagne en 1813 sera moins heureuse. Ses indécisions à Bautzen vont empêcher Napoléon d’empocher la victoire décisive qui lui manque. A Dennewitz, ses mouvements de troupe sont incompréhensibles et il subit le courroux de l’Empereur. Il ne parvient pas non plus à être décisif à Leipzig.
Après une campagne de France là aussi difficile mais héroïque à bien des égards (notamment à Montmirail), il presse Napoléon d’abdiquer début avril. Il se rallie ensuite avec entrain aux Bourbons et au nouveau roi Louis XVIII. Il est fait Pair de France. Lorsqu’il apprend le retour de l’île d’Elbe et le débarquement de son ancien maître le 1er mars 1815, il jurera devant le roi de ramener l’Empereur déchu dans une cage de fer.

En 1815 le maréchal Ney est tiraillé

Sous la pression de ses hommes et des ralliements successifs, mais aussi car il est lui-même tiraillé entre deux feux, il se rallie à Napoléon. Après une vive explication entre les deux hommes lors de leur retrouvaille, Ney prend congé et n’apprendra sa prise de commandement que quelques jours avant le début de la campagne.
Sans aucun doute bouleversé par sa « double trahison » en moins d’un an, ses mouvements et ses mises en place tactiques sont pour le moins douteuses en Belgique. Lors de la bataille des Quatre-Bras, il est trop attentiste, n’emporte pas le carrefour alors qu’il est en position de pouvoir le faire et ne provoque pas de lui-même une avancée rapide de ses troupes le lendemain matin. Il sacrifie notamment les cuirassiers de Kellermann inutilement, qui lui en tiendra rudement rigueur à la fin de la campagne.

A Waterloo, son comportement fut mal jugé.

Anticipant une retraite des Alliés, il enjoint une brigade de cuirassiers de le suivre. Beaucoup d’autres, sans en avoir reçu l’ordre, vont suivre le mouvement. On connait la suite, le résultat de son entêtement sera catastrophique pour la cavalerie impériale, jusque dans les rangs des régiments de la Garde.
Il emporte cependant la ferme de la Haie-Sainte à la fin de la journée et permet à Napoléon d’obtenir une fenêtre de tir pour la victoire.
Finalement vaincu, Napoléon bat retraite et Ney aussi. Détesté de tous les partis politiques lors du retour du Roi, il est le premier nom de la liste émise par Fouché pour le souverain et qui comporte les noms des traîtres des Cent-Jours.
Arrêté dans le Lot, au château de Bessonies. Il arrive le 19 août à Paris, refuse l’aide que lui propose Exelmans pour le faire évader, et sera emprisonné à la Conciergerie (dernière demeure du couple royal sous la Révolution), puis à celle du Luxembourg.
Ney, qui craint la rancune de certains de ses anciens compagnons membres du Conseil de Guerre, demande à être jugé par la Chambre des pairs, à majorité composée de fervents royalistes. Cela causa certainement sa perte. Après un simulacre de procès, la mort est votée. Cinq maréchaux d’Empire votent la mort, alors même qu’ils ont combattu avec lui. Ce sont Pérignon, Marmont (décidément fort attiré par la traîtrise), Sérurier, Victor et Kellermann (le père du général qui avait rancune contre Ney suite à la campagne de 1815). Chateaubriand vote également la mort. Le maréchal Davout est venu lui défendre le maréchal et Gouvion Saint Cyr, autre maréchal membre de la Chambre, se refuse à voter la mort.

« Venez voir comment meurt un maréchal de France ! « .

Michel Ney, maréchal d’Empire

« Voilà, mon cher ami, une grande leçon pour apprendre à mourir « .

Maréchal Ney, propos rapportés par Rochechouart

Le Maréchal Ney sera admirable de courage même dans la mort

Comme le veut la coutume, son corps repose seul, face contre terre, pendant 15 minutes.
Deux événements vont alors se produire. Un cavalier anglais saute au-dessus du cadavre avec son cheval et un général russe, d’origine hollandaise, se moque ouvertement du maréchal. Retrouvé par le Tzar Alexandre Ier, admirateur du maréchal, il sera rayé des cadres de l’armée russe après ce geste. 

Le maréchal Ney avait alors 46 ans et laisse une veuve et quatre enfants. Il est aujourd’hui inhumé au Père Lachaise.

Prenez soin de vous,

Antoine Charpagne – Responsable culturel du Mémorial de la bataille de Waterloo 1815